Dark Light
Ce n’est pas encore l’amour fou entre la Hollande et ‘le’ Hollande…

A en juger le nombre de jeux de mots dans la presse, ça n’a échappé à personne : le nouveau président de la République porte le nom d’un pays ou, plus exactement, celui d’une région des Pays-Bas. Mais qu’implique pour les deux pays le fait que la France soit devenue ‘hollandaise’ ?

Paradoxalement, l’autre pays du fromage s’intéresse peu à François Hollande. Depuis le début de ce siècle, il s’est retranché derrière ses digues. Ce qu’il se passe à l’étranger n’intéresse guère les Néerlandais, même quand il s’agit d’un pays voisin. Certes, les médias bataves ont couvert l’élection présidentielle, mais sans trop d’enthousiasme ni de curiosité. Dans un pays où même des socialistes ont déclaré qu’ils voteraient Sarkozy, Hollande n’a pas grand chose à chercher.

De mauvais augure ? Jusqu’à peu, la « Hollande » était synonyme d’un pays figurant dans le trio de tête des contrées les plus heureuses du monde. Un pays quasiment sans chômage. Un pays avec une grande égalité sociale. Ou tous les objectifs d’un président social-démocrate. Mais le vent a tourné. Désormais, ce patronyme est celui d’une région devenue le — très — mauvais élève de la classe européenne. En récession pour le troisième trimestre consécutif, les Pays-Bas connaîtront cette année la pire performance économique du Vieux Continent. Juste derrière… La Grèce et l’Espagne. Ou quand le nom de Hollande ne rime pas forcément avec « bonnes nouvelles ».

Ce n’est pas tout. Parmi les sujets qui fâchent les Pays-Bas et la France, se trouvent les obligations européennes. Cette semaine, Mark Rutte, le Premier ministre néerlandais, a de nouveau dit « Nee » aux Eurobonds. Et de faire ainsi bloc avec la chancelière allemande Angela Merkel. Les avares bataves redoutent de payer plus cher leurs emprunts qui, à un taux d’intérêt de 1,8% sont historiquement bon marché, et de financer ainsi les pays dépensiers comme l’Hexagone. Pourtant, cette inquiétude n’est basée sur aucune réalité. Certes, les Eurobonds représentent un saut dans l’inconnu mais ils sont devenus indispensables. Qu’on le veuille ou non. Déjà en janvier 2011, le député européen Guy Verhofstadt (libéraux) proposait un plan où tout le monde paierait moins sur le long terme. En gros, 60% de la dette nationale des pays européens serait mutualisée. Les pays ‘faibles’ paieraient une petite prime afin d’alléger les coûts des pays ‘forts’. A l’époque, sa proposition était passée inaperçue, mais dans les semaines décisives à venir, les leaders européens devraient s’inspirer de certains de ses éléments.

Le refus de Rutte est catégorique mais anecdotique. N’oublions pas que ce Premier-ministre est devenu démissionnaire après seulement 16 mois de « règne ». Il sera logiquement remplacé après les élections anticipées du 12 septembre prochain. D’après les sondages, le plus grand parti serait à l’issue du scrutin le SP, l’équivalent du Front de Gauche. Il faudra une coalition d’au minimum six partis pour arriver à une majorité. Une mission impossible, autrement dit. Conséquence : à l’automne, l’échiquier politique en ‘Hollande’ aura une toute autre allure.

Malgré tout, malgré la crise, la ‘Hollande’ possède toujours un modèle social plus performant que ne l’est le français. Sa grande égalité est l’un des résultats d’un esprit libéral et pragmatique qui serait jugé diabolique en France. Dans le pays de ses ancêtres, l’homme de consensus qu’est François Hollande pourrait trouver de l’inspiration pour relancer l’économie française. Dans l’intérêt de l’Europe, les Néerlandais, eux, feraient mieux de s’approcher à leur tour un peu plus de ces autres ‘Hollandais’.

Tribune publiée dans La Croix du 25 mai 2012

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