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Avec au moins 192 ressortissants parmi les 298 disparus dans l’attentat sur le vol MH17 en Ukraine, les Pays-Bas sont durement touchés par la tragédie.

“Tout le monde connait quelqu’un” titrait ce samedi le quotidien néerlandais NRC Handelsblad. Avec au moins 192 ressortissants parmi les 298 disparus dans l’attentat sur le vol MH17 de la Malaysia Airlines en Ukraine, les Pays-Bas sont durement touchés par la tragédie.

nrcC’est peut-être difficile à imaginer mais dans ce pays situé à seulement 75 kilomètres de la France, tout le monde ou presque se connaît. Les 17 millions d’habitants vivent sur une superficie équivalente à celle de la région Aquitaine, la densité y est de 450 habitants/km2 et, malgré une très forte urbanisation le pays ressemble parfois à un village. Tout le monde connaît untel qui connaît untel… Et aujourd’hui, c’est toute une nation qui est plongée dans le deuil.

Les Néerlandais sont un peuple qui voyage. Et cela quelles que soient leurs origines. Cela explique la diversité sociale des passagers du vol MH17. Parmi les victimes : un avocat, qui était aussi entraîneur d’un club de foot local, sa femme et leurs trois enfants, une étudiante en médecine, une fleuriste, un couple de restaurateurs, un DJ, un soldat, un sénateur, des familles entières, des chercheurs brillants qui consacraient leur vie à la recherche d’une solution contre le SIDA, et 80 enfants. Ou une radiographie de la population néerlandaise sordidement résumée sur une liste de victimes.

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Intérêts économiques

Ce ‘crash’, dont les rebelles ou séparatistes pro-russes sont soupçonnés d’être responsable, révèle brutalement l’extrême faiblesse de la politique étrangère de l’Union européenne. Voilà près d’un an que le conflit en Ukraine dure. Cela aux portes de l’UE. Autant de mois qui n’ont pas suffi aux leaders européens pour trouver une solution. Aucun état-membre ne veut froisser la Russie et prendre le risque de contrarier son président Vladimir Poutine. A chacun son intérêt : l’Allemagne veut éviter qu’un boycott de la Russie ne nuise à son industrie, la France ne songeant même pas à annuler la livraison de deux frégates de guerre. Ou encore les Pays-Bas, parmi le plus gros investisseurs en Russie, faisant tout pour maintenir de bonnes relations avec le président russe et sa bande. Avec succès : la fille de Poutine réside dans une banlieue agréable de La Haye.

Ironie macabre : selon le site 925.nl Rostec, le fabricant du missile qui a abattu le vol MH17, est domicilié à Amsterdam pour des raisons fiscales. Lors d’une conférence de presse vendredi, le Premier ministre néerlandais Mark Rutte a refusé d’accuser qui que ce soit. Ce que n’a pas hésité à faire quelques instants plus tard Barack Obama. Pour le président américain, le “missile qui a abattu le Boeing a été tiré depuis une zone contrôlée par les séparatistes prorusses” dans l’est de l’Ukraine. Et Barack Obama de souligner les liens militaires entre la Russie et les rebelles.

Vaines promesses

Dès vendredi, le premier ministre néerlandais Mark Rutte a souligné l’importance d’une investigation indépendante. Mais « une enquête digne de ce nom est impossible dans ces conditions », disait vendredi mon ami et confrère Olaf Koens, qui se trouve actuellement sur le lieu du crash. Les rebelles, qui contrôlent la zone où a eu lieu le crash, sont accusés d’altérer les indices nécessaires à l’enquête. Ces terroristes limitent l’accès du site aux observateurs de l’OSCE, se seraient emparé des boîtes noires de l’appareil et ont déjà enlevé 38 corps du site pour faire « leurs propres investigations ». Par le passé, Vladimir Poutine a déjà promis aux Pays-Bas des enquêtes indépendantes. Par exemple dans le cas de l’assassinat du cameraman Stan Storimans. A chaque fois, les promesses russes n’ont abouties.

Courage politique

Comparaison n’est certes pas raison. Mais le choc aux Pays-Bas provoqué par le crash du vol MH17 est de la même ampleur que le « 11-Septembre ». Proportionnellement à sa proportion, le pays a perdu plus de citoyens dans la catastrophe, que les Etats-Unis lors des attentats de 2001. Obama, dans sa déclaration vendredi semble avoir compris cet impact dévastateur. Il parle d’un ‘wake-up call’ pour l’Europe. Les Européens sont maintenant impliqués dans une guerre qu’ils ont trop longtemps voulu ignorer. Ou de s’en accommoder. Il est temps de se réveiller et d’arrêter d’être opportunistes. Il faudra une réponse cohérente, ferme et unie pour élucider les circonstances de cet acte de guerre et pour conduire les responsables devant une cour, de préférence internationale. Fini la Realpolitik cynique, osons maintenant le courage politique. Nous le devons aux 298 victimes.

Photo : HereIsTom / Foter / Creative Commons Attribution-NonCommercial-NoDerivs 2.0 Generic (CC BY-NC-ND 2.0)

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