Appel ‘républicain’ raté pour les socialistes. Ce dimanche, le taux de participation aux municipales était encore plus bas que lors du premier tour une semaine auparavant : 38% (estimation à 20h).
En boudant ainsi les urnes, les Français se sont exprimés : la politique ne mérite plus leur attention. On peut le déplorer ou critiquer mais le droit de vote est justement exactement ça : un droit. A chacun de l’utiliser ou pas. C’est une règle fondamentale dans une démocratie. Certes, il faut changer la politique (et les politiques), mais quid du processus électoral ? Lui aussi décourage et cela politiques et médias n’en parlent pas. Ou si peu.
Si on veut inciter la population à se rendre aux urnes, il faut impérativement faciliter la procédure. Voici quelques propositions concrètes pour simplifier le vote et augmenter la participation :
- En France, le système mis en place pour voter est archaïque et bureaucratique. Celui qui veut glisser son bulletin dans l’urne doit affronter maints obstacles administratifs et géographiques. La carte d’électeur devrait être valable dans tous les bureaux de vote. L’actuel bout de papier pourrait prendre la forme d’un passe nominatif de la taille d’une carte bancaire.
- Avec ce passe, on pourrait voter partout pour les élections sans circonscription (aujourd’hui uniquement la présidentielle). Il faudrait également multiplier les bureaux de vote dans une même circonscription. Instaurer par exemple des bureaux de vote mobiles dans des lieux très fréquentés tels les gares, les aéroports, les centres commerciaux et les aires de repos des principaux péages.
- Il faudrait également faciliter le vote par procuration. Voter pour son voisin ou son ami se ferait en présentant son passe et sa carte d’identité, comme on le fait pour récupérer un recommandé à la Poste. Demander une procuration, au commissariat ou au tribunal, lieux vétustes et pas franchement des plus accueillants ne serait plus nécessaire. (Par ailleurs, que la police s’occupe des affaires électorales me semble faire fi de la séparation des pouvoirs entre législatif et judiciaire, mais ça, c’est un autre débat.)
- Instaurer une base de données nationale des électeurs enregistrés pour vérifier la validité du passe et éviter les doublures.
- Rendre l’inscription sur les listes électorales automatique. Le système actuel est archaïque et empêche un grand nombre de potentiels électeurs d’exprimer leur vote. En attendant, ne pas clore l’inscription le 31 décembre, mais au plus tard deux semaines avant chaque élection.
Un seul tour
- Abolir le second tour pour les municipales et le remplacer par un seul tour proportionnel. Cela obligerait les conseils municipaux à instaurer des coalitions constructives et de gouverner avec un plus grand consensus. Moins d’électeurs se sentiraient exclus et iraient voter.
- Pour toutes les élections, non plus de listes par parti, mais la possibilité de pouvoir voter directement pour une personne sur la liste (‘vote préférentiel’). Cela rendrait le scrutin plus personnel, plus politique, moins sectaire.
Age limite
- Réfléchir à l’instauration d’un âge limite ou à limiter le nombre de mandats successifs. Si les jeunes ne vont pas dans l’isoloir, c’est peut-être parce qu’ils ont très peu en commun avec les dinosaures masculins qui règnent sur un grand nombre de villes aujourd’hui. Est-ce vraiment une pub pour la démocratie que le plus vieux maire de France (de Saint-Seurin-sur-l’Isle, Gironde) entame un neuvième mandat à 92 ans ?
Moins d’élus
- Diminuer le nombre d’élus. Paris en compte actuellement 163 (et même 527 en incluant les conseillers des arrondissements). Soit un élu sur 14.000 habitants. C’est proportionnellement presque deux fois plus que Berlin ou Amsterdam. Et même 23 fois plus que Londres.
- Election directe des maires. Aujourd’hui ce sont les conseillers municipaux qui élisent le maire. Ce qui mène à la drôle de situation que les dames NKM et Hidalgo ont été omniprésentes, tandis que seuls les habitants du respectivement 14e et du 15e arrondissement parisien ont pu voter pour l’une des deux directement. (Une proposition de loi dans ce sens a été faite en 2007).
- La prochaine fois que l’on pourra voter pour le conseil local sera en 2020. Trop long. Pour que les citoyens aient l’impression de pouvoir influencer la politique locale, il faudrait des rendez-vous plus réguliers. Des échéances de 4 ans au maximum.
- Arrêter de parler aux électeurs avec condescendance. Le citoyen qui ne va pas voter ne mérite pas une leçon de morale. Et même ceux qui utilisent leur carte électorale sont confrontés à l’attitude hautaine des instances de la République : « Voter est un droit, c’est aussi un devoir civique », est-il inscrit sur la carte électorale. Les guillemets pouvant laisser penser que la personne ayant marqué la phrase n’y croyait pas trop non plus.
Fête !
- Et puis, si tout cela ne marche pas, faisons des élections une grande fête. Oui, pourquoi pas ? Avec, comme pour la fête de la Musique, des concerts, des animations et des transports en commun gratuits.
Crise démocratique
Bien évidemment, ce ne sont pas des recettes magiques. Mais ceux qui critiquent l’abstention feraient mieux d’arrêter de donner des leçons et proposer des solutions pour sortir de cette crise démocratique. Avec ces changements peu coûteux et démocratiquement très rentables, on ne résoudra toujours pas le problème des candidats sans proposition concrète mais au moins le citoyen pourra mieux s’exprimer. Il y a sans doute plein d’autres évolutions à imaginer pour améliorer la démocratie et faire baisser l’abstention. Mais finalement, la démocratie est ce qui nous assure que nous ne serons pas mieux gouvernés que nous ne le méritons…