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Les bulles diplomatiques donnent le hoquet aux citoyens bataves. Et pourtant, après un rapide calcul, ces coupes de champagne se révèlent faire du bien au pays des tulipes.
La bulle de la discorde

Les bulles diplomatiques donnent le hoquet aux citoyens bataves. Et pourtant, après un rapide calcul, ces coupes de champagne se révèlent faire du bien au pays des tulipes.

La semaine dernière, le quotidien néerlandais gratuit De Pers a crû bon de publier les dépenses des ambassades de sa majesté batave en 2008, note de frais par note de frais. L’article a fait le tour des médias du plat pays arrivant sur le banc des députés du Parlement. Si certains d’entre eux ont été “désagréablement surpris” par l’ampleur des dépenses, dixit RTL News, les autres Néerlandais eux, ont vu carrément rouge.

Rouge également le carton décerné au représentant de la Reine… en France. Avec 182.000 euros S.E. Hugo Siblesz se voit décerner le titre officieux d’ambassadeur le plus dispendieux. Diantre ! A titre de comparaison les diplomaties de Washington, Tokyo et Moscou ont également déclaré plus de 100.000 euros de frais. Le montant comprend dîners, réceptions, activités promotionnelles, voyages et autres réjouissances du ressort d’un émissaire. Batave ou pas.

Soit. Ce qui a le plus chiffonné les Néerlandais dans cette histoire de petits fours ? Les bulles. Les bulles de champagne. De simples bulles, certes délicieusement exquises mais des bulles d’un coût 14.000 euros pour l’ambassade des Pays-Bas à Paris. Fichtre, s’est dit mon concitoyen néerlandais qui, il faut le savoir, ne boit pas plus d’une coupe par an. Autre élément à noter : dans ce pays où tout le monde prône l’égalité absolue, le champagne comme le foie gras ou les huîtres sont des mets considérés comme une décadence égalitaire inadmissible.

C’est pas Versailles
Mais 14.000 euros pour du champagne sur un an, est-ce cher ou cheap ? Invité régulier des ambassades de Paris, je suis bien placé pour comparer –et savourer– les us et coutumes de la vie diplomatiques dans la capitale française. S’il est un hôte délicieux comme le sont ses confrères étrangers, S.E. Hugo Siblesz ne recrée en rien la cour de Louis XIV où le champagne coulerait à flot dans des fontaines d’or. Il serait même un brin conformiste, un trait de caractère hautement apprécié aux Pays-Bas.

Au fait, 10 briques, ça fait combien en bulles ? Prenons le prix moyen d’une bouteille d’un cru correct sans être exceptionnel : 34,50 euros, disons. Sans négocier pendant des heures avec le producteur, on devrait probablement faire descendre la bouteille à 25 euros HT. Avec le budget de l’ambassadeur néerlandais, on pourra donc acheter 560 bouteilles par an. Soit un humble nombre de neuf flûtes par jour.

La Fête de la Tulipe est the événement à l’ambassade. Oui, c’est l’anniversaire de la reine et à cette occasion, l’ambassadeur donne une belle réception au cours de laquelle, vous la devinez, on boit du champagne. Le nombre d’invités ? 600, selon mes estimations, beaucoup étant Français. Ce soir-là, si chaque convive boit en moyenne deux verres (et croyez-moi, c’est un peu plus… On rentre en vélo après), 200 bouteilles seront sabrées ce soir là. Soit un tiers environ de la “ration” annuelle de brut.

A la vôtre
Si les Néerlandais aiment bien éplucher les coûts, ils oublient parfois d’en voir les bénéfices. L’un des devoirs d’un ambassadeur est de servir les intérêts commerciaux de son pays (et à un degré moindre son rayonnement culturel). La France est le troisième partenaire dans ce domaine des Pays-Bas, après la Belgique et l’Allemagne. Selon le Ministère de l’Economie, les exportations des produits néerlandais vers la France ont atteint, en 2008, un montant de 32,4 milliards d’euros. Inversement, les Pays-Bas importèrent cette année là 16,9 milliard de produits français. Soit un excédent sur le bilan commercial pour les Bataves de 15,5 milliards d’euros. Evidemment, ce bon résultat n’est pas seulement le fruit du travail de l’ambassadeur mais le rôle joué par la diplomatie dans le monde des affaires ne peut être sous-estimé.

Autrement dit, en échange d’une bouteille et demie de bulles par jour, la France verse quotidiennement la bagatelle de plus de 42 millions d’euros sur les comptes bancaires des entreprises néerlandaises. Bref, S.E. Hugo Siblesz est non seulement le champion note de frais, mais très probablement aussi champion du retour aux investissements pour la SA Pays-Bas. Et cela mérite de porter un toast à la santé du contribuable néerlandais qui profite largement de l’esprit d’entreprise des ambassadeurs néerlandais. Mais pour ceux à qui cela poserait encore un problème, j’ai encore un pack de lait tourné au frigo. Proost !

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